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Vauban entre Mer et Durance : construire et détruire

Conférence par :

Jean-Loup FONTANA, Conservateur du Patrimoine

L’espace géographique des Alpes occidentales constitue, spécialement dans sa partie méridionale, un enjeu politico-économique de premier ordre. C’est par les grandes vallées  joignant la ligne de crête principale au couloir rhodanien que transitent les flux marchands et que circulent les armées entre Europe méditerranéenne et Europe centrale ou septentrionale. La maîtrise de ces axes est ainsi un impératif, ce que conforte la théorie des « frontières naturelles » apparue en France au XVIIe siècle.
Si dès le Moyen Âge des dispositifs défensifs isolés ont pu être établis, il revient au Grand Siècle de Louis XIV de les organiser en véritable système de fortification. Le propos est alors de verrouiller les axes de circulation au débouché des passages d’altitude qui y convergent afin de concentrer l’effort financier que représente l’établissement de ces fortifications et de leur garantir une efficacité maximale en cas de conflit.
Vauban, avec sa perspicacité habituelle et en bénéficiant des conseils avisés de stratèges connaissant parfaitement le terrain comme son ami le général Catinat, s’attache à doter cette frontière du royaume d’un véritable bouclier capable de tenir tête aux ambitions du duc de Savoie généralement allié aux souverains ayant hérité de l’ancien Empire.
Dans cette perspective, la plupart des vallées alpines s’équipent de véritables places-fortes en modernisant d’anciennes structures (Entrevaux, Colmar-les-Alpes, Sisteron), en renforçant des dispositifs inadaptés aux guerres modernes (Briançon, Saint-Vincent-les-Forts) ou en créant ex nihilo des équipements militaires complets (Mont-Dauphin).
En 1713, le rattachement au royaume de France de la vallée de Barcelonnette interrompt cet effort devenu inutile et, dans un certain nombre de cas, les projets élaborés par Vauban et ses émules resteront dans les cartons, d’autres ne connaissant qu’un simple début d’exécution.
Dans les secteurs plus proches du littoral, les fortifications existantes sont souvent anciennes (Antibes, Saint-Paul-de-Vence) et ne sont pas orientées vers les cols alpins, leur fonction principale étant le contrôle des circulations maritimes. Le coût de leur « retournement » serait considérable et leur rôle stratégique n’y gagnerait pas grand-chose. De cette analyse résulte, d’après le conseil de Vauban, le démantèlement et le rasement intégral de l’ancien château de Nice à l’occasion d’une occupation de la place par les troupes de Louis XIV.
Il demeure de ces évolutions un riche patrimoine militaire, dont la diversité des formes résulte de la variété des terrains et des paysages géographiques, d’autant mieux conservé qu’il n’a pratiquement jamais subi d’épisode guerrier.

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